Il était une fois l’Histoire : épisode 1
Je voudrais dans les prochains articles de ce blog vous raconter l’histoire de la découverte de l’Antarctique, de la Terre Adélie et des Expéditions Polaires Françaises ; vous expliquer comment et pourquoi nous sommes ici. Bien sûr, je ne vais pas vous refaire l’Histoire mais je vais juste vous raconter la « petite histoire »… Je sais aussi que parmi ceux qui lisent nos blogs, certains sont bien mieux informés que moi sur le sujet, d’autres ont participé à des expéditions polaires. Alors, n’hésitez pas à laisser des commentaires si je ne suis pas assez précise ou si vous estimez que je suis carrément dans le faux !!!
L’histoire commence il y a bien longtemps. Les Grecs, avec Pythagore et Platon pensent déjà qu’il existe un continent austral à l’opposé du monde boréal, empêchant la terre de basculer. Pourtant les siècles vont se succéder et cette /Terra ingognita/ va rester introuvable…
C’est au 18ème siècle seulement que l’on va commencer à entrevoir ce monde austral. C’est le grand navigateur James Cook qui va jeter les fondements de notre savoir sur l’Antarctique. Le 10 décembre 1772, il aperçoit des « oiseaux blancs de la taille de pigeons » ce qui semble être des pétrels des neiges. Puis, le 17 janvier 1773, il franchit le cercle polaire pour la première fois de l’histoire mais il est arrêté par une immense zone de pack. Il est obligé de faire demi-tour. Après plusieurs tentatives, il retourne en Angleterre, où il écrit : « J’ai fait le tour de l’hémisphère austral dans une haute latitude et je l’ai longé de manière à prouver, sans réplique, qu’il n’y a point de continent, à moins qu’il ne soit près du pôle et loin de la portée des navigateurs. » Il dit aussi que s’il existe bel et bien un continent au sud, ce ne peut être qu’une région de désolation.
J’insiste sur cette partie afin que vous vous rendiez compte à quel point l’Antarctique est restée longtemps absente de l’histoire des découvertes. Au début du 19ème siècle, ce continent était encore inconnu !!
En 1819, une expédition russe sous le commandement de Bellinghausen découvre des terres au sud de l’Amérique du sud. Les premières terres antarctiques viennent d’être découvertes dans la péninsule Antarctique, et seront baptisées « Terre Alexandre ».
En 1837, Jules Dumont d’Urville, officier de marine déjà connu pour avoir découvert et apporté en France la Vénus de Milo, propose au roi Louis Philippe un projet de navigation dans le Pacifique... Les deux navires que sont l’Astrolabe et la Zélée, partent de Toulon le 11 septembre 1837. En décembre 1839, alors qu’il est à Hobart, Dumont D’Urville apprend que l’anglais James Clark Ross et l’américain Charles Wilkes sont en route vers le sud. L'enjeu est énorme: quel pays va découvrir les nouvelles terres et pouvoir annexer de nouveaux territoires ? De Hobart, Jules Dumont d’Urville remet les voiles vers le sud, sans tarder.
Le 19 janvier 1840, à bord de l’Astrolabe et de la Zélée, l’équipage et le capitaine Dumont d’Urville aperçoivent la côte du continent. Le 21 janvier, deux canots abordent un îlot et une dizaine d’hommes y débarquent. Ainsi à lieu la première découverte du véritable continent antarctique. Vincendon Dumoulin, déposé sur un iceberg, mesure avec précision les données magnétiques qui indiquent que cette expédition s’est approchée plus qu’aucune autre du pôle magnétique, situé à l’intérieur du continent. Dumont d’Urville va longer des falaises de glaces sur soixante milles, il vient de découvrir une terre qui portera désormais le nom de son épouse… la Terre Adélie
A la même période, Wilkes aperçoit une apparence de côte à 500 nautiques à l’est et Ross explore la région qui portera le nom de mer de Ross… mais ceci est encore une autre histoire. Dumont d’Urville dit adieu à la Terre Adélie le 1er février 1840, soit 10 jours après sa découverte et en rapporte un œuf dont l’expédition de Scott certifiera par la suite qu’il s’agit d’un œuf de manchot. La fin du 19ème et le début du 20ème siècle voient naître une grande activité de découverte de l’Antarctique. La Terre Adélie est déclarée française par le traité de 1924. Mais personne, depuis Dumont d’Urville, ne va y remettre les pieds… personne et cela pendant plus de 100ans…
Suite au prochain épisode !!!
Statue de Jules Dumont d'Urville de la Base Dumont d'Urville.
Cette Statue est située à la sortie du séjour, direction le 42, dortoir
hivernant.
Pour finir, je voulais juste rajouter un petit aparté sur la vie de Jules Dumont d’Urville mais ceci n’est pas en lien direct avec l’Antarctique. Dumont d’Urville a été un grand navigateur, outre la Terre Adélie, on lui doit aussi la découverte de la Terre Louis Philippe, la position exacte de 200 îlots du Pacifique, certains relevés de la côte de Nouvelle Zélande (oui, la Nouvelle Zélande aurait pu être française), et j’en passe. Cet homme a été un sacré navigateur et a parcouru tous les océans de la planète à une période où GPS et moteur de bateau n’existaientt pas… En un mot, c’était un grand homme… Mais connaissez vous la fin de son histoire ? Jules Dumont d’Urville est mort avec son épouse Adèle et leur fils de 14ans dans la première catastrophe ferroviaire française, le 8 mai 1842 à Meudon. Autrement dit, tout bêtement, dans un accident de train.
Dois-je en conclure que vous avez autant de chance qu’il vous arrive quelque chose à Paris dans le métro, que moi sur la banquise ? Et si effectivement c’était vrai ? A bon entendeur…
A bientôt !
Marie
Ps : Ce que je vous ai raconté dans cet article est tiré d’une part du livre « The Worst Journey in the World, Antarctique 1910-1913 » de Apsley Cherry-Garrard, qui raconte en partie l’expédition de Scott pour la conquête du Pôle sud géographique. D’autre part, les informations sont également tirées du livre de Yves Valette « Ceux de Port Martin, Pionniers de Terre Adélie » qui raconte l’histoire de la première mission à hiverner en Terre Adélie.