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Journal d'Hivernage
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5 février 2011

Les autochtones

 

Entre les arrivées et les départs du bateau, du raid et des avions, j’en oubliais de vous parler de l’essentiel : les autochtones. Non, pas les bipèdes poilus qui vous disent braver la glace, le froid et le vent mais plutôt les autres. Les autochtones, les vrais, ceux qui restent des heures, des jours, debout dans la tempête, luttant sans ciller ; ceux qui me prêtent leurs plumes pour écrire un mot.

L’île des Pétrels ne pourrait pas mieux porter son nom qu’en ce moment, même si au premier regard on préférerait l’appeler l’île aux manchots…

Certes, les parents Adélie sont partout poursuivis par leur « estomac sur pattes » de rejetons, leur volant presque la nourriture dans le bec. Les petites poires duveteuses blotties dans les pattes de leurs parents sont bien loin… Le bébé est devenu ado, avec tout ce que cela comporte : mue, coiffure de punk, insatiable appétit et un soupçon d’insolence.


 

1

Période "Jackson Five" de l'Adolescence



 

2
"On ne parle pas comme ça à sa mère"

Mais pour mieux comprendre notre île, il faut l’admirer de plus près : grimper sur ses flancs, se mettre à genoux devant ses cailloux, rayer nos lunettes de soleil sur son granite pour pouvoir regarder d’encore plus près… et là, l’île des Pétrels apparaît : pétrels des neiges et damiers, fulmars antarctiques, océanites de Wilson au complet. Chacun son nid, chacun sa stratégie : le pétrel des neiges préfère l’abri d’un caillou, l’océanite l’abri d’une fissure, le fulmar sa falaise et le damier un petit nid à flanc de colline, aux yeux de tous… surtout des skuas.

Pourtant, en ce moment, où que j’aille, le résultat est le même pour tout le monde : ça pouponne sévère et pas que dans les manchotières ! Des pétrels miniatures ont poussé partout sur l’île, petites boules de duvet à qui on donnerait le bon dieu sans confession… ou presque…

«Ah m..., voilà que j’ai encore les chaussures recouvertes d’un cocktail de crevettes prédigérées et les gants imbibés de rillettes de poissons ».

Vous l’aurez compris, les poussins dès leur plus jeune âge ont la même manie que leurs parents : tu m’approches, je te vomis dans la tête ; tu me touches, je t’enfonce mon crochet dans la main et je continue à te gerber dans la manche. Ils sont charmants ces enfants. Mais comment vous décrire ça pour que vous ayez également l’odeur ? Peut être juste en vous rapportant la phrase de Steph l’autre jour : Tu t’es lavée les cheveux aujourd’hui, Marie ?

Et pourtant, à l’idée que je vais bientôt les quitter, j’ai enfermé un peu de leur élixir dans un petit tube que j’ai caché tout au fond de mes affaires… pour les jours de nostalgie quand je serais de retour dans l’autre monde…



 

3
Pétrel des neiges et son poussin après la tempête

 

4
Damier du cap et son poussin de quelques jours

 


5
Couple de Damiers et leur poussin


6
Fulmar antarctique et son poussin

 

7

Poussin Fulmar antarctique, le vomi au coin des "lèvres"...


8

Poussin Pétrel des neiges en pleine action,
dans "sa caverne de vomi séché"      
   

 
Quand aux parents skuas, eux aussi élèvent leurs petits. Les boules de plumes grises sorties de l’œuf au début du mois de janvier, sont déjà de sacrés malicieux. Quand les parents donnent l’alerte « un intrus sur le territoire ! », le petit bout s’aplatit dans les cailloux et joue le mimétisme… caillou parmi les cailloux. Par contre, si vous avez la chance d’observer la famille sans vous faire attraper et vous faire prendre en chasse, vous aurez votre récompense. Vous verrez alors la petite boule grise campée sur ses poteaux, réclamer la nourriture à ses parents. Un petit sifflement de poussin et voilà maman et papa qui apportent à manger, découpant les morceaux fraîchement régurgités et les présentant devant le bec du petit.

 

9
Poussin de 1 ou 2 jours, avec son parent
et son "frère œuf"


10
L'expression "le prendre sous son aile"
viendrait-elle des Skuas ?


Pour finir, pour les intimes : Sale temps pour nos manchots. Isabelle a perdu ses œufs au début de la saison et n’a donc pas de poussin cette année. Grisou lui, n’a pas voulu s’avouer vaincu si vite, il a couvé son œuf (l’autre était perdu depuis longtemps) pendant un certain temps, alors que d’autres avaient déjà de gros poussins. Inutile de vous préciser que le résultat a mené à la même conclusion que pour Isabelle : reviens l’année prochaine.

Quand à Monsieur et Madame skua, du dortoir été, ils ont
eu plus de chance cette année. Ils ont eu un mignon petit poussin nommé Lama qu’on ne se lasse pas d’admirer et de regarder grandir par la fenêtre. Lama a maintenant un peu plus d’un mois et il est bien avancé dans sa mue. J’aimerais tellement le voir voler avant mon départ… le voir devenir un Jonathan Livingston.

Gros bisous

A bientôt,

Marie


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Commentaires
V
Ton article est super génial, sur la vie de ses beaux oiseaux de mer.<br /> Je pense qu'ils sont heureux malgrès le froid.<br /> j'espère que ddu gardera son environnement sain ,pour que ses animaux reviennent chaques années.<br /> gros gros bisous et merci encore pour ce beau article.<br /> Maman
M
La LPO ne pourrait pas nous faire vivre mieux que toi cette aventure. <br /> On perçoit l'innocence dans le regard de ces petits si mignons, quels qu'il soient. On mesure la beauté de ce monde loin des bruits de bottes qui résonnent parfois de ci, de là...<br /> J'espère que tu auras la chance unique de voir un jour un lama voler sans ce ça ne soit comme les éléphants pendant ou juste après une bringue.<br /> Jean-Paul
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